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    Va, et fais de même!

    par Pierre Kneubühler

    mardi, le 24 mars 2015
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    • DUMOND Jacky

      je tiens a vous remercier pour ce bon texte

    • YOBOUE

      Cet enseignement m'édifie et je veux souvent le méditer. Que DIEU vous bénisse pour ces bons enseignements que vous partez avec nous.

    Un spécialiste de la loi se leva et lui dit, pour le mettre à l'épreuve : « Maître, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? » Jésus lui dit : « Qu'est-il écrit dans la Loi ? Comment lis-tu ? » Il répondit : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain, comme toi-même. » « Tu as bien répondu, lui dit Jésus ; fais cela, et tu vivras. »Mais lui voulut se justifier et dit à Jésus : « Et qui est mon prochain ? » Jésus reprit : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. Il tomba aux mains de bandits qui le dépouillèrent, le rouèrent de coups et s'en allèrent en le laissant à demi-mort. Par hasard, un prêtre descendait par le même chemin ; il le vit et passa à distance. Un lévite arriva de même à cet endroit ; il le vit et passa à distance. Mais un Samaritain qui voyageait arriva près de lui et fut ému lorsqu'il le vit. Il s'approcha et banda ses plaies, en y versant de l'huile et du vin ; puis il le plaça sur sa propre monture, le conduisit à une hôtellerie et prit soin de lui. Le lendemain, il sortit deux deniers, les donna à l'hôtelier et dit : "Prends soin de lui, et ce que tu dépenseras en plus, je te le paierai moi-même à mon retour." Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé aux mains des bandits ? »Il répondit : « C'est celui qui a montré de la compassion envers lui. » Jésus lui dit : « Va, et toi aussi, fais de même » (Luc 10.25-37).

    La parabole du bon Samaritain a fait jusqu'ici les beaux jours de L'Eglise chrétienne. Elle est une vieille connaissance…mais elle a encore et toujours quelque chose à nous apprendre. A condition toutefois que nous nous laissions surprendre par elle, par l'actualité de son message dérangeant.

    Comme moi, comme beaucoup, vous avez sans doute pris l'habitude d'appeler parabole cette séquence que seul l'auteur de l'évangile de Luc et des Actes des apôtres a pris soin de transmettre. Et ce n'est un secret pour personne que comme toute parabole, lue dans sa forme littéraire, elle peut être interprétée selon sa sensibilité théologique. Or, avec l'histoire du bon Samaritain, la marge de manœuvre du lecteur est limitée. Il est en effet confronté à un récit dont il est difficile de tordre le sens tant il est vrai qu'il a valeur d'exemple. Et il constitue de ce fait toute la somme de ce que le lecteur doit savoir sur le rapport qu'il peut y avoir entre la foi et les œuvres.

    De fait, deux paroles relevées dans l'ensemble de notre séquence montrent nettement combien foi et œuvres sont inséparables : « comment lis-tu ? » et « va et fais de même ! ».

    Je vais m'en expliquer, mais je voudrais auparavant faire un bref rappel du contenu de la dite parabole du bon Samaritain et des raisons qui l'ont inspirée :

    Des bandits de grand chemin agresse un voyageur sur la route qui relie Jérusalem à Jéricho, le roue de coups, le dépouille de ses biens et le laisse à demi-mort.

    Passent alors deux personnages parfaitement typés, fonctionnaires du Temple : un prêtre et un lévite. L'un et l'autre se penchent sur le moribond, mais se gardent bien d'intervenir. Tous deux changent de trottoir…comme on a l'habitude de dire.

    Peu après survient un Samaritain, mal aimé des juifs de stricte obédience, qui n'hésite pas à se porter au-devant du blessé, le charge sur son âne et le confie à l'aubergiste le plus proche, s'engageant auprès de ce dernier à régler l'ensemble des frais qu'occasionneront les soins et l'hébergement de l'infortuné.

    La morale de l'histoire ? Des trois passants, le prochain n'est pas celui — ou ceux — qu'on pense, mais l'hérétique Samaritain. De quoi faire réfléchir ! Mais permettez que je quitte un instant la parabole en elle-même et que je fasse un petit retour en arrière pour repérer chez Luc quelques éléments du contexte dans lequel elle est prononcée.

    ​La question est tout à fait pertinente et nous pourrions aisément la faire nôtre : « que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? »Entouré de ses disciples et sans doute de personnages à l'affût de ses éventuels écarts de langage, Jésus se trouve tout à coup interpellé par un lévite (gardien de l'application de la Loi), sur la question brûlante des conditions à remplir pour accéder à la vie éternelle. Si l'on en croit la remarque de Luc, les intentions de cet homme ne sont pas particulièrement pures. « Il se leva, nous dit le texte, pour le mettre à l'épreuve » ; plus littéralement « pour lui tendre un piège ». Cela dit, la question est tout à fait pertinente et nous pourrions aisément la faire nôtre : « que dois-je faire pour hériter la vie éternelle ? » Autrement dit, sur quoi dois-je régler ma vie ? Quel comportement dois-je adopter pour vivre selon ce qui a cours dans le monde nouveau de Dieu ?

    Selon ses habitudes, Jésus répond à la question par une autre question, obligeant ainsi son interlocuteur de se positionner par rapport à ce qu'il a coutume d'enseigner : « qu'est-il écrit dans la loi ? », « qu'y lis-tu ? », ou plus exactement « comment lis-tu ? ». Impressionnante minute de vérité pour l'homme qui n'ignore ni le contenu de l'enseignement qu'il dispense, ni ce à quoi il est renvoyé dans sa vie sociale quotidienne. Et la réponse tient en deux mots : « Tu aimeras. » Deux mots qui balayent l'ensemble de son univers religieux et de son univers social : Deutéronome 6.5, « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée », et Lévitique 19.18, « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Tout est dit ! Et le débat aurait pu s'arrêter-là. Ce que fait d'ailleurs Marc au chapitre 12, dans une séquence proche de la nôtre, et qui s'empresse d'ajouter : « Il n'y a pas d'autre commandement que ceux-là. » Ce que confirme Jésus, chez Luc, en déclarant : « Fais cela et tu vivras ».

    Tout est dit en effet, mais notre docteur de la loi qui sait que Jésus n'a rien à lui apprendre en ce domaine, tente de sortir de l'entretien le moins mal possible, sous la forme d'une autre et ultime question : « Et qui est mon prochain? » ... comme s'il ne savait pas ; mais peut-être ne le sait-il pas ! Et nous voici revenus à notre parabole/récit exemplaire.

    Cette dernière tend ainsi à démontrer que s'il n'existe aucune interactivité entre l'enseignement biblique, la pratique cultuelle et le service du prochain — c'est-à-dire une sociabilité constructive — alors, foi et œuvres sont en parfaite contradiction (Jacques 2), ce que l'attitude fuyante du prêtre et du lévite, partisans de la non-intervention démontre avec éloquence.

    Or l'exemple fourni par Jésus tend à prouver le contraire : le Samaritain de la parabole, qui n'est certainement pas un champion de l'orthodoxie religieuse, a surtout compris que si le sens de la vie a pour fondement les commandements de Dieu, le non-juif qu'il est, doit en assurer la traduction dans des actes, dans le service du prochain, dans le respect de la personne, dans la protection de son devenir. Et c'est en cela qu'il est devenu le prototype du prochain. Aussi Jésus a beau jeu de poser alors la question centrale, non pour le confondre mais pour l'aider dans sa quête du salut : « Lequel des trois te parait avoir été le prochain de celui qui était tombé entre les mains des brigands ? » Et la réponse du docteur de la loi ne se fait pas attendre : « C'est celui qui a exercé la miséricorde. » On peut traduire aussi par « qui a fait preuve de bonté ». « Va et fais de même », lui dit alors Jésus.

    Pour le lecteur qui reçoit cette parabole, la question n'est-pas seulement « qui est mon prochain ? » mais « comment puis-je être le prochain de tout homme, de toute femme ? ». Et c'est ici que l'actualité nous rejoint avec la multitude de ceux qui, auprès comme au loin, sollicitent notre solidarité active : exclus, démunis, sans-abri, sans papiers, réfugiés malnutris, etc., avec comme corollaire cette interrogation : « mais comment puis-je répondre à tant d'appels ? ».

    Vivant à notre époque, Jésus aurait pu mettre en scène une autre population agressée, violentée, méprisée, et d'autres protagonistes indifférents ou compatissants, mais cela n'enlève rien à l'exemple que la parabole s'emploie à nous montrer ; dans la mesure où elle entend nous faire comprendre qu'à hauteur d'homme, il est toujours possible de faire quelque chose.

    Au moment de conclure, il n'est pas inutile de revenir un instant sur notre postulat initial à savoir que nous sommes ici au cœur du débat sur foi et œuvres, interpellés à la fois par le « comment-lis- tu ? » et le « va et fais de même ». Deux démarches qui s'inscrivent dans un même mouvement : celui de la foi qui se nourrit et celui de la foi qui agit.

    ​Le lévite est renvoyé à toutes les dimensions de l'amour dont nous savons qu'elles transcendent notre relation à Dieu et au prochain.Nous avons vu plus haut que Jésus, s'adressant au lévite à propos du contenu de la loi, lui avait posé la question « qu'y lis-tu ? ». C'est du moins ce que nous trouvons dans telle ou telle version. En réalité il nous faut lire « comment lis-tu ? ». Autrement dit, comment fais- tu vivre cette « directive » de la loi ? Comment t'y prends-tu pour faire en sorte qu'elle ne soit pas une parole figée, statufiée ? Sorti d'une lecture conventionnelle, vers quoi ton interprétation du commandement d'amour te conduit-il dans ta pratique sociale quotidienne ? En bref, quel lien établis-tu entre tes convictions fondées sur la parole de Dieu et ce qu'elle te demande de faire en tant que prochain ? Du « comment lis-tu ? » au « va et fais de même », le lévite est renvoyé à toutes les dimensions de l'amour dont nous savons qu'elles transcendent notre relation à Dieu et au prochain.

    Lire et croire l'exigence de l'amour, et faire ce qu'elle nous ordonne, c'est tout un. Ainsi se trouve tracée pour nous la voie sur laquelle nous sommes invités à marcher. A la suite du Samaritain qui, pour n'être pas « fonctionnaire » des choses sacrées, n'en était pas moins le messager en actes du Christ, serviteur et prochain de tous les humains.


    Autres lectures bibliques : Deutéronome 30.9-14 ; Jacques2.14-22

    Cet article, adapté d'un sermon, a été publié avec l'aimable authorisation de l'auteur.

    L'image est une adaptation de The Good Samaritan, par George Frederic Watts (1817-1904).

    This depiction of the Good Samaritan by George Frederic Watts depicts a man in a rocky and desolate landscape helping an injured man to his feet.
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