L’utilisation abusive de chansons significatives, ou même seulement un manque de compréhension et de sentiment quand on les chante en commun, a un effet dévastateur. Nous ne pouvons pas chanter cette chanson profonde maintenant, alors que nous venons d’en entendre une interprétation superficielle.  Il en va de même pour d’autres chansons à la profonde signification. Quand nous les chantons dans la communion fraternelle dans l’Esprit, ce que nous sentons relève de la sainteté la plus intime. De tels chants ne devraient être chantés qu’à des moments très spéciaux, seulement lorsque Dieu nous fait vivre des expériences particulières. Comment pouvons-nous suggérer des chansons qui ont été autrefois écrites dans l’Esprit, avec l’intention de produire un sentiment général qui n’existe pas ; comment pouvons-nous chanter « Gottistgegenwärtig ! » (Dieu est présent avec nous), quand personne ne sent vraiment la présence de Dieu ; comment osons-nous chanter « Herr der Welt, Dirhuld’gengenwir ! » (Seigneur de tous, nous nous agenouillons devant Toi) quand l’atmosphère de la réunion ne rend pas un véritable hommage à la grandeur de Dieu ! Ce genre d’utilisation abusive de ces chants frôle le péché contre le Saint-Esprit.

Une fois qu’une chanson est morte pour nous, il est très difficile de la ramener à la vie. . .

Il faut comprendre que nous chantons souvent des chansons apparemment superficielles qui ne donnent qu’une idée des choses les plus grandes, des choses qui, à un moment particulier, ne devraient pas être exprimées avec plus de force. Nous avons besoin d’un critère intérieur, d’une sensibilité pour ce qui émeut le cercle à un moment donné et pour ce qu’exprime chacune de nos chansons, soit qu’elle apporte une libération, soit qu’elle donne du courage, remue nos cœurs ou qu’elle nous secoue au plus profond de nous-mêmes. Plusieurs fois dans le passé, dans nos communautés du Bruderhof, c’est par le Mouvement des Jeunes qu’a été donné ce secret de l’Esprit, ce discernement dans notre chant. Et vous savez, pour en avoir tous fait l’expérience, que nous ne pouvons pas simplement chanter mécaniquement ces chansons profondes.

Pour cette raison, il est inestimable que certains d’entre nous trouvent encore et encore de nouveaux chants – de tous les siècles, anciens dans leur origine peut-être, mais nouveaux pour nous. De la même manière, les chansons composées parmi nous ou les nouvelles mélodies écrites sur des poèmes sont un cadeau de grande valeur pour notre cercle.

Nous avons besoin d’élargir continuellement notre réserve de chansons si nous voulons éviter qu’une seule d’entre elles soit déformée ou rebattue. Une fois qu’une chanson est morte pour nous, il est très difficile de la ramener à la vie ; quelle que soit la chanson, pour nous, elle est tout simplement morte. Quand on pense à l’avenir, la responsabilité qui incombe à l’Église dans le domaine du chant est énorme. Alors, pour conclure, pensons aux paroles de Peter Ridemann, écrites il y a 400 ans, dans sa confession de foi :

Paul dit : « Chantez et faites dans votre cœur une mélodie à l’Éternel, avec des psaumes, des hymnes et des chants spirituels. » Pour cette raison, nous disons que chanter des chants spirituels est bon et agréable à Dieu si nous chantons de la bonne manière, c’est-à-dire, avec attention, dans la crainte de Dieu, et comme inspirés par l’Esprit du Christ.

C’est pour cette raison qu’on les appelle des chants spirituels : c’est-à-dire qu’ils sont inspirés, créés et composés sous l’impulsion de l’Esprit, et qu’ils attirent et poussent les hommes à la béatitude. Par conséquent, puisqu’ils sont créés et composés par l’inspiration et l’impulsion de l’Esprit du Christ, ils doivent aussi être chantés comme inspirés par le même Esprit, si l’on veut qu’ils soient chantés avec droiture et au service des hommes.1

Note

  1. Peter Rideman, Confession of Faith: Account of Our Religion, Doctrine, and Faith, 2nd éd. (Rifton, NY: Plough Publishing House, 1970), p. 123