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    Nicolas Poussin - Landscape with Saint John on Patmos

    Éphèse – la perte du premier amour

    par Gustave Tophel (1839-1917)

    mercredi, le 28 septembre 2016
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    Ecris à l'ange de l'Eglise d'Ephèse: ‘Voici ce que dit celui qui tient les sept étoiles dans sa main droite, celui qui marche au milieu des sept chandeliers d'or: Je connais tes œuvres, ton travail et ta persévérance. Je sais que tu ne peux pas supporter les méchants. Tu as mis à l’épreuve ceux qui se prétendent apôtres sans l’être, et tu les as trouvés menteurs. Oui, tu as de la persévérance, tu as souffert à cause de mon nom et tu ne t'es pas lassé. Mais ce que j'ai contre toi, c'est que tu as abandonné ton premier amour. Souviens-toi donc d'où tu es tombé, repens-toi et pratique tes premières œuvres. Sinon, je viendrai [bientôt] à toi et j'enlèverai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne changes d’attitude. Cependant, tu as ceci pour toi: tu détestes les œuvres des Nicolaïtes, tout comme je les déteste, moi aussi. Que celui qui a des oreilles écoute ce que l'Esprit dit aux Eglises: Au vainqueur je donnerai à manger du fruit de l'arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu.’ (Apocalypse 2.1-7)

    I

    Fondée par l'apôtre Paul, qui passa près de trois ans à Éphèse au début de son troisième voyage missionnaire, l'église de cette ville devint bientôt l'un des plus importants foyers de la lumière évangélique. Dans une conquête, à mesure que l'armée s'avance et triomphe, le quartier général se transporte plus loin. Ainsi en fut-il aussi dans la conquête spirituelle du monde. Jérusalem d'abord, Antioche ensuite, Éphèse plus tard, furent successivement le centre d'action et comme le quartier général de cette intrépide phalange qui montait à l'assaut des forteresses de Satan.

    On sait, par les Actes des apôtres, quels furent l'ardeur, la décision et le zèle des nouveaux convertis à Éphèse. Poussés par la puissance irrésistible de l'Esprit, les uns vinrent confesser publiquement leurs fautes; d'autres qui, jadis, vivaient de la magie, brûlèrent sans hésiter leurs précieux volumes : tous rendirent à l'Évangile un témoignage enthousiaste et conséquent. Aussi la Parole de Dieu agit-elle dans cette ville avec un degré de force qu'elle atteignit rarement ailleurs.

    À Paul succéda Timothée qui reçut, à Éphèse même, les deux lettres conservées dans le canon sous son nom. Il va de soi que l'église en entendit les pressantes exhortations. Mais elle eut mieux encore: elle reçut elle-même une épître, son épître, la lettre aux Ephésiens, l'une des plus profondes, des plus sublimes et, cependant, des plus pratiques de l'apôtre Paul.

    Enfin, après saint Paul, après Timothée, vint l'apôtre de l'amour, saint Jean, l'ami intime de Jésus, qui consacra à cette église la fin presque céleste de sa longue carrière.

    C'est probablement aux chrétiens d'Éphèse qu'il écrivit la première de ses trois épîtres, où se résument, en deux mots, sa pensée et son âme : Dieu est amour pour nous, nous devons être amour pour lui et pour nos frères. Grands et nombreux furent donc les privilèges de cette église favorisée entre toutes; mais grande, aussi, et redoutable sa responsabilité devant Celui qui réclame selon qu'il a donné! Longtemps elle fut à la hauteur de cette responsabilité, en accomplissant la tâche d'activité, de fidélité et de patience pour laquelle Dieu l'avait si richement pourvue; et, quarante années après sa fondation, le Seigneur pouvait lui rendre un témoignage qui, au premier abord, ne laisse rien à désirer : « je connais tes œuvres, lui dit Jésus, ton travail et ta patience; et je sais que tu ne peux souffrir les méchants, et que tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres sans l'être, et que tu les as trouvés menteurs, et que tu as souffert, et que tu as eu patience, et que tu as travaillé pour mon nom, et que tu ne t'es point lassé. »

    Quel magnifique éloge! Il porte sur quatre points : attachement d'Éphèse à la saine doctrine, pratique des devoirs de la vie chrétienne, activité infatigable et patience dans les souffrances endurées pour le nom de Jésus-Christ. Fidèle aux recommandations solennelles que saint Paul avait adressées à ses anciens réunis dans la ville de Milet, l'église a veillé, et, au jour où ont paru « les loups ravissants, très dangereux pour le troupeau, , ces faux docteurs qui, sous des apparences chrétiennes, renversaient la foi chrétienne, l'église les a reconnus et démasqués.

    Un ennemi plus redoutable encore l'a trouvée sur ses gardes : après l'hérésie de la doctrine, l'hérésie de la vie, de faux principes de conduite chrétienne ont essayé de s'introduire chez elle. Ce n'était même pas alors une théorie, ce n'était encore qu'une tendance, celle d'hommes nommés nicolaïtes pour des motifs qui restent assez obscurs, et qui consistait dans un coupable accommodement des exigences de la vie chrétienne avec les habitudes de la mondanité païenne. Cette tendance, fatale entre toutes, qui se présente une fois ou l'autre devant la porte de toute église, Éphèse l'a, aussi, énergiquement combattue et répudiée.

    Enfin son activité pour la cause de l'Évangile est encore considérable; ses œuvres sont très nombreuses, peut-être même plus nombreuses qu'au début, et autant elle tolère peu les séducteurs et les méchants, autant, à l'inverse de beaucoup d'églises, elle sait supporter mépris et souffrances pour le nom du Crucifié.

    Ainsi : orthodoxie de la foi et pureté de la vie; haine de l'erreur et horreur de la mondanité; infatigable activité et patience sous la croix, tels sont les traits distinctifs de la congrégation d'Éphèse.

    II

    Une telle église n'est-elle pas parfaite ? N'est-elle pas la réalisation de la prophétie qui annonce l'union mystique de Jésus-Christ avec son épouse immaculée? Que peut-on désirer de plus? Le paradis promis à cette église dans la conclusion de notre lettre, elle le possède déjà, elle y est parvenue; elle jouit de l'arbre de vie et nul blâme ne saurait lui être adressé!

    « J'ai quelque chose contre toi, » dit Celui qui se promène dans le cercle des sept chandeliers! - Quelque chose contre Éphèse? Quelque chose contre une telle église? Mais que lui manque-t-il? Que peut-on raisonnablement attendre de plus? Un enseignement plus pur? Elle a retenu intact celui de Paul, de Timothée et de Jean. Une discipline plus rigoureuse? Mais n'a-t-elle pas haï les œuvres des nicolaïtes? Des œuvres plus nombreuses, une action plus étendue? Mais le Seigneur ne dit-il pas qu'elle s'est fatiguée pour lui? Aurait-elle renié tant soit peu le nom de son Maître pour diminuer le poids de son opprobre ? Pas davantage : le Seigneur n'a rien à observer sur ce point. Alors, que lui manque-t-il donc?

    Ce qui laisse à désirer dans cette église, ce n'est pas la quantité des œuvres, c'en est plutôt la qualité! Aussi Jésus censure-t-il moins les œuvres elles-mêmes que l'esprit des œuvres. Le corps est intact: il n'y manque aucun membre; nulle fonction de suspendue: un œil exercé, mais humain, n'y pourrait rien découvrir de défectueux, aucune lésion, aucune maladie apparente: c'est l'âme du corps qui est malade; c'est le feu intérieur qui tend à s'éteindre; c'est ce quelque chose de mystérieux, d'insaisissable et d'indéfinissable, qui échappe à l'analyse et qui est, pourtant, si réel et si essentiel, c'est la vie, la vie intime, la vie spirituelle dont la quantité diminue. Et quel est cet esprit des œuvres, cette âme de l'activité et de la patience, cette vie de la foi, ce quelque chose sans quoi tout est vain, tout est mort dans une conduite extérieurement chrétienne? C'est l'amour : l'amour répandu dans le cœur par le Saint-Esprit, l'amour pour Dieu, l'amour pour Jésus - Christ, l'amour pour les âmes, l'amour, sans lequel les œuvre les plus belles perdent toute valeur aux yeux de Dieu, et sans lequel, aussi, ne sont rien, absolument rien, et celui dont la foi transporte des montagnes, et celui qui livre ses biens aux pauvres ou son corps au bûcher.

    L'amour fait défaut aux chrétiens d'Éphèse! Complètement? Non pas, car, en son absence absolue, on ne s'expliquerait pourtant pas ses vertus. Éphèse n'est pas Laodicée; son état n'est pas celui de la tiédeur; il le deviendra, s'il s'aggrave. Moins encore est-il celui de la mort spirituelle reprochée à Sardes. Telle qu'elle est, l'église d'Éphèse a encore plus d'amour que d'autres églises moins favorisées; mais, comparée à elle-même, à ce qu'elle était au début (car c'est ainsi que Jésus-Christ juge), elle a fait des pertes, elle commence à décliner, elle n'a plus son premier amour.

    III

    Quelle cause faut-il assigner à cet affaissement spirituel? - Peut-être une trop grande ardeur dans la polémique? Peut-être, dans la discipline, une rigueur excessive? Toute église, toute époque ou toute personne appelée à la lutte ou à la répression des abus court de grands dangers spirituels. Il y aurait lâcheté à fuir une tâche aussi sacrée, mais non moins d'imprudence à s'en dissimuler les périls.

    Sans un redoublement de communion avec Celui qui est amour, autant que sainteté et vérité, à ces frottements nombreux l'huile de la charité se dessèche vite; le zèle devient aride et cassant; la fermeté dégénère en raideur, en dureté; la vigilance, en défiance: on confond, dans la même haine, le pécheur et le péché; on oublie les saintes compassions du Christ, et la douceur, avec laquelle on doit reprendre, fait place à l'irritation et à l'acrimonie.

    Peut-être Éphèse a-t-elle donné contre cet écueil. Dans sa seconde lettre à Timothée, Paul le signalait à plusieurs reprises. Il suppliait déjà qu'on ne prit pas goût à ces disputes de mots, qui engendrent les mauvais soupçons, les divisions et les haines.

    Mais, indépendamment de cette cause particulière, une autre, plus générale, produit infailliblement cette diminution d'amour, si rien ne la neutralise. Cette cause, c'est tout simplement le temps; le temps qui s'attaque à tout, qui use tout, qui fane tout, à moins que, par une réaction énergique et incessante, le cœur et la volonté ne triomphent de son action. Laissé à lui-même sur la voie du bien, l'homme ne suit pas l'impulsion donnée; il ne continue pas à monter, il retombe plutôt. On a de Vinet un mot redoutablement vrai: « L'homme, a-t-il dit, tend continuellement à descendre. » Eh bien, dans le chrétien lui-même, si une force supérieure à cette loi de pesanteur morale ne l'attire continuellement plus haut, le poids du vieil homme entraîne le nouvel homme partiellement privé du secours de Dieu. De là la nécessité d'une communion permanente avec Christ, et la solennité de cette déclaration : « Hors de moi vous ne pouvez rien, demeurez en moi. » En même temps que ce « demeurer en Christ, » la vie spirituelle baisse tout de suite : ferveur, joie chrétienne, piété, feu de l'Esprit, toutes ces grâces dans la grâce déclinent et s'éteignent vite. Alors, comme par habitude prise, par devoir envers soi-même ou envers le prochain, on continuera les mêmes, œuvres, sans que rien au dehors en trahisse l'altération secrète; mais leur moelle, leur sève, l'âme des œuvres, sans laquelle celles-ci ne sont que cadavres pour Dieu, toute cette vie délicate du dedans sera atteinte jusqu'à s'épuiser tout à fait, si l'on ne remédie promptement au mal.

    Si Éphèse n'a pas échappé à cette action du temps, c'est que les membres de l'église ne se sont pas suffisamment retrempés dans la prière collective et individuelle. Ils se seront un peu reposés sur leurs premiers succès, sur les bénédictions antérieurement reçues. Ils ne se seront pas remplis toujours plus de l'Esprit (1); peut-être l'auront-ils contristé (2) maintes fois sans rentrer assez promptement et assez avant dans la communion de Christ. Alors l'amour a diminué d'autant dans cette église. On n'y a plus ressenti, dans le culte, cette même ferveur des premiers jours, cette même cordialité et cette même intimité entre frères, ce même abandon et cette même simplicité dans les réunions communes, cette même joie radieuse et ce même élan pour l'évangélisation. On y croyait, comme par le passé, à la mort expiatoire et à la résurrection de Jésus-Christ, au pardon gratuit et à la vie éternelle. On y serait mort pour de telles convictions, et, cependant, la pensée de cet amour provoquait moins d'amour, l'espérance chrétienne moins de sainte impatience, la communion des enfants de Dieu moins de tressaillements, la perdition des âmes moins de poignantes douleurs.

    IV

    Hélas! ce commencement d'affaissement spirituel paraît n'avoir pas été particulier à l'église d'Éphèse. Presque toutes les autres en étaient, alors, ou déjà atteintes ou très fortement menacées, en sorte que cette congrégation pourrait bien être le type de l'état de l'Église apostolique dans le dernier quart du premier siècle. Mais n'a-t-on pas vu le même phénomène se reproduire plus tard dans les églises issues de la reforme ou des réveils, et n'en serions-nous pas nous-mêmes, dès longtemps, témoins dans les nôtres? je connais une église et des églises, je connais des sociétés chrétiennes qui, elles aussi, ont travaillé avec ardeur pour Jésus-Christ; des églises qui ont rallumé et maintenu avec fidélité le flambeau de la foi évangélique; des églises qui ont remis en lumière le principe de la souveraineté de Jésus-Christ et la doctrine de l'œuvre de l'Esprit; des églises qui ont évangélisé, combattu, rompu jadis avec le monde, enduré l'opprobre et quelquefois même la persécution; des églises qui ont réagi en bien sur celles-là mêmes qui les repoussaient. Je connais des églises, je connais des sociétés qui, actuellement, pour un œil moins perspicace que celui du Surveillant des églises, ont encore un aspect relativement enviable, des principes vrais, une influence qui dépasse leurs étroites limites. Mais si Jésus écrivait à cette église, à ces églises, que leur dirait-il? N'auraient-elles pas à entendre le même reproche qu'Ephèse?... sinon un reproche pire : « J'ai quelque chose contre toi; tu as perdu ton premier amour? » Bien des sentiments ne s'y sont-ils pas refroidis? bien des feux, éteints? bien des larmes de repentance et de reconnaissance, dès longtemps séchées? Mes frères, connaissez-vous ces églises? Connaissez-vous cette église?

    Mais, des églises passons aux âmes, passons à vous, mes frères. Je veux croire que vous méritez encore les éloges accordés à Éphèse : même activité, mêmes convictions, mêmes principes qu'autrefois. Cependant Celui qui sonde les cœurs ne voit-il rien de changé dans votre vie intérieure? Votre piété n'a-t-elle pas décliné ? Votre amour, perdu de sa première ardeur? Mes frères, vous souvient-il de ce que fut la fête de votre cœur lorsque, après les angoisses de la repentance, une soudaine lumière vous permit de crier : « J'ai trouvé, j'ai trouvé la paix? » Quels transports! Quel alléluia! Quelle joie débordante! Ah, je n'ignore pas que tout n'était pas également enviable dans cette première éclosion de la vie chrétienne ! Inexpériences, imprudences, exagérations, excès divers, telles en sont les défectuosités ordinaires. Les nouveaux convertis donnent souvent fort à faire à Dieu et à leurs frères.

    Mais, avec ces défauts, qui ne sont ni si marqués ni si universels que vous le croyez peut-être, quel saint enthousiasme, quel rayonnement, quelle fraîcheur de sentiments, quelle intensité, quelle exubérance de vie! Quelles ineffables émotions dans les premières études de la Bible, quelle intimité dans la prière! Que d'épanchements, que d'effusions dans la communion fraternelle, quel besoin d'entretiens, moins sur les dogmes que sur Christ lui-même, et moins sur les intérêts extérieurs de son règne que sur les expériences intimes! Quelle soif de bonne propagande, quel amour des âmes, quelles angoisses à leur égard, quelle hardiesse et quelle éloquence déployées pour les amener à Dieu !

    Mes frères, qu'en est-il de tout cela aujourd'hui? En, avançant avez-vous plus gagné que perdu, ou plus perdu que gagné? À quel prix avez-vous acquis cet équilibre dont vous vous vantez? Ah! si votre cœur ne brûle plus comme celui des disciples d'Emmaüs; si vous ne pouvez plus crier comme Pascal - « joie, joie, pleurs de joie! » si nous sommes dans cet état qu'exprimait si naïvement une femme du Lesotho en disant : « La prière n'a plus d'humidité dans mon âme; » si nous ne nous répétons plus comme Paul : « Malheur à moi si je n'évangélise! » si nous n'avons plus, à l'exemple de Zinzendorf, une seule passion : Christ et les âmes pour Christ, nous avons commencé à déchoir, nous méritons, à notre tour, le reproche du Sauveur: « J'ai quelque chose contre toi, » nous avons perdu, nous aussi, notre- premier amour.

    Alors il ne faut pas nous laisser dire par Satan que cette perte est excusable parce qu'elle est inévitable. Si elle l'était, le Seigneur, qui est juste, en ferait-il l'objet d'un reproche à Éphèse? Encore moins faut-il croire que la perte en est irréparable. Cette église serait-elle invitée à refaire ses premières œuvres ? Non, non, cette perte n'est pas plus irréparable qu'inévitable. Pas d'excuses et pas de découragement! Il faut nous en humilier, mais d'une humiliation qui amène la découverte et la suppression de la cause du mal. Puis il faut y porter remède; et le remède, le Seigneur l'indique à l'église d'Éphèse. Lui désigner l'arbre de vie, comme récompense future, c'est le lui montrer comme source de vie dans le temps présent. S'il remplit les cieux, cet arbre descend pourtant jusqu'à la terre. Cet arbre, dont nous pouvons manger les fruits et recevoir la sève, cet arbre est un cep et nous en sommes les sarments. C'est pour nous en être plus ou moins séparés que nous nous sommes appauvris. En nous y laissant rattacher, nous en recevrons grâce sur grâce. Car cet arbre, c'est Jésus-Christ glorifié, Jésus se communiquant à l'âme par l'Esprit; Jésus partiellement perdu, mais Jésus qui se redonne pleinement à nous, si nous nous redonnons tout entiers à lui.

    Oh, mes frères, soit pour nos églises, soit pour nous-mêmes, que de motifs de retrouver en Christ ce premier amour perdu!

    La menace faite à Éphèse est suspendue sur nos têtes. Pour notre église, suppression, non pas subite et par des violences, mais insensible et par voie d'extinction. Pour nous-mêmes, déclin progressif, dépérissement de l'âme, retour à l'insensibilité, puis, au bout, réprobation!... Oh, cette parole : « J'ai quelque chose contre toi ... » quelle menace! Celui à qui toute puissance a été donnée dans le ciel et sur la terre, celui qui nous jugera, celui qui enverra les uns à sa droite et les autres à sa gauche par- un décret irrévocable, celui-là, mon frère, a quelque chose contre toi! Oui, quelle menace! Mais aussi quel reproche, bien plus sensible qu'une menace pour un cœur chrétien! « J'ai quelque chose contre toi ! » Celui que ton cœur aime encore, celui à qui tu dois tout, ton Sauveur, ton frère, ton ami suprême, Jésus a quelque chose contre toi!

    Oh! je me le représente venant à chacun de nous, avec ses mains percées, et disant: « Mon enfant, pourquoi ton amour est-il moindre à mon égard? Le mien a-t-il diminué? T'ai-je fait quelque peine? As-tu quelque chose contre moi? » - Non, bon Sauveur, nous n'avons rien contre toi. Tu ne nous as pas été infidèle; c'est nous qui sommes des ingrats, nous qui méritons que tu nous abandonnes! Mais pardonne-nous' plutôt! Tu nous as dit : « Si ton frère a quelque chose contre toi, va et te réconcilie avec ton frère. » Tu nous l'as dit sachant qu'il y consentirait. Eh bien, toi, notre meilleur frère, consens aussi à cette réconciliation. Rends-nous toute la joie de notre salut. Toi seul, tu le peux, toi seul, en réchauffant notre cœur sur ton cœur, tu peux nous rendre notre premier amour!

    Et vous, chers auditeurs, qui n'avez pas perdu, ce premier amour par la raison bien simple que vous ne l'avez jamais éprouvé, ne recevrez-vous pas instruction? Demeurerez-vous dans votre indifférence? À la sévérité de Jésus envers l'Église, mesurez celle qu'il réserve au monde! S'il menace ceux qui perdent leur premier amour, que ne sera-t-il pas contre ceux qui méprisent le sien? Si, Éphèse doit se repentir, ne devez-vous pas vous convertir? Convertissez-vous à ce Sauveur qui vous aime, et que votre premier amour rallume le feu du nôtre. Oui, faites-nous honte, soyez plus chrétiens que nous excitez notre jalousie, dépassez-nous, et, stimulés par votre zèle, nous courrons avec vous, nous lutterons avec vous, nous aimerons avec vous Celui dont le dernier amour n'a jamais été et ne sera jamais inférieur au premier. Ainsi soit-il !


    Extrait du livre Les sept églises d'Asie par G. Tophel (Lausanne : Editions Arthur Imer, 1878)

    Image par Nicolas Poussin (1594–1665) - Landscape with Saint John on Patmos (Paysage avec Saint-Jean à Patmos)

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    Nicolas Poussin  - Landscape with Saint John on Patmos
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